Leur volonté de faire bouger le continent et leur détermination à améliorer les services et les méthodes de travail n’ont d’égal que leur talent. Elles sont une quinzaine de startups sélectionnées dans plusieurs villes du Cameroun pour prendre part du 24 au 28 juin dans la capitale Yaoundé, à la semaine de l’innovation numérique. Une initiative du ministère camerounais des Postes et Télécommunications (Minpostel) qui vise à accompagner sur le long terme l’émergence d’un écosystème numérique mature et solide porteur de nouvelles opportunités économiques.
Dans le hall de l’école nationale des postes et télécommunications de Yaoundé, site choisi pour l’événement, Dorothée Mvondo prend du plaisir à présenter son projet au public venu à la rencontre des innovateurs. Elle est l’une des co-promotrices d’Agrix tech, une application dotée d’une intelligence artificielle qui diagnostique les maladies des cultures à leur stade primaire et propose des recommandations de traitement et de prévention aux agriculteurs.
«Nous avons pensé à ce projet suite à un constat. Le changement climatique a un impact sur le développement de l’agriculture dans nos pays en Afrique. Pourtant l’agriculture constitue encore la principale activité pour une bonne partie de nos populations. Nous voulons réduire grâce à cette application plus de 90 % de perte des récoltes des agriculteurs occasionnés par les effets du climat et des maladies de plantes. Ces maladies qui déciment parfois les cultures des agriculteurs sont dûes non seulement au mauvais diagnostic mais aussi, parfois, au traitement non adapté appliqué sur les plantes. Quand l’agriculteur découvre que ces plantes sont malades, il utilise souvent des produits inadaptés, des pesticides qui à la longue ont un impact sur la santé humaine, sur l’environnement et la biodiversité», confie la jeune dame au micro de Sputnik.
Grâce à son intelligence artificielle intégrée, l'application Agrix tech fournit instantanément aux petits agriculteurs des compétences en matière de diagnostic des maladie des cultures agricoles qui leur font défaut.
«Il suffit de prendre une photo de la plante grâce à l’application et elle va se charger de diagnostiquer et de vous dire de quoi souffre votre plante et le type de traitement approprié ou d’engrais à utiliser pour booster votre culture. L’un des avantages est que l’application peut fonctionner sans connexion internet et les résultats seront donnés en plusieurs langues locales pour aider nos agriculteurs qui ne parlent pas toujours français ou anglais. Il suffira de sélectionner une langue», rajoute Dorothée.
La jeune équipe d’Agrix tech espère trouver des financements et des partenaires pour accompagner le lancement et la distribution de cette technologie et ainsi améliorer durablement les rendements des petites exploitations.
«Pour lancer l’application, nous avons besoin d’un financement pour avoir notre propre data center. Nous avons déjà un prototype opérationnel et si nous trouvons des partenaires, nous publierons la version commerciale de notre produit en janvier 2020», espère Dorothée.
Cofondateurs de Mokine « Chez nous dans le grand nord du Cameroun, il se pose très souvent le problème de vol du bétail et des épidémies qui ravagent les animaux et appauvrissent les éleveurs. Nous avons pensé à une solution en mettant sur pied une application couplée à un bracelet électronique qui permet aux éleveurs de géolocaliser son troupeau de bêtes et aussi d’avoir constamment le bulletin de santé de chaque animal via son smartphone. L’application alerte instantanément l’éleveur quand il y a une anomalie ou quand l’animal va au-delà du périmètre défini », décrit Albert Takede l’un des cofondateurs au micro de Sputnik.
«Pour le moment le bracelet est en cours de conception. Il nous faut des moyens pour avoir un prototype. Donc nous sommes ici à la recherche de financement. Il nous faudra 25 millions de F CFA pour lancer le prototype selon nos budgets prévisionnels», nous confie Albert.
À l’ère des réseaux sociaux et du tout digital, Boris Ngnintedem, un autre startupper rencontré par Sputnik, veut œuvrer à une utilisation rentable des réseaux sociaux sur le continent. Pour cela le jeune innovateur à créer Boot Africa, une plateforme qui ambitionne de rémunérer les utilisateurs du continent.
«Nous voulons mettre un terme à l’usage non productif des réseaux sociaux par les internautes africains. Au Cameroun par exemple, vous avez 2,5 millions de personnes qui se connectent quotidiennement mais qu’est ce qu’ils y gagnent ? Rien. Nous avons donc décidé de créer une plateforme sociale sur laquelle tous les likes seront rémunérés. Artistes, journalistes et autres producteurs de contenus seront payés en fonction du nombre de like sur notre plateforme», explique Boris au micro de Sputnik.
Boot Africa ambitionne également de lancer parallèlement une cryptomonnaie dénommée likecoin pour assurer les transactions financières sur sa plateforme.
« Pour l’instant la version beta est déjà en ligne. On effectue encore des tests. Nous espérons bâtir une grande communauté comme les réseaux les plus utilisés dans le monde. Nous avons du potentiel, des idées. Il nous faut juste un meilleur accompagnement», dit-il tout enthousiaste.
À la première semaine de l’innovation numérique du Cameroun, Boot Africa et les autres participants pourront repartir avec une récompense du gouvernement. Pour le ministère camerounais des postes et télécommunications, initiateur de l’événement, il ne s’agit pas seulement de détecter les meilleurs projets, mais aussi et surtout, de les accompagner afin que ceux-ci s’érigent en véritable entreprise d'aide au développement du pays.