Alors que les Gilets jaunes estiment que leurs demandes formulées à l'Elysée n'ont pas été satisfaites, Sputnik a demandé à un linguiste de présenter son analyse sur les interventions d'Emmanuel Macron faites en réponse à la crise qui sévit dans le pays depuis plusieurs mois.
Avant d'examiner en détail chaque intervention, le linguiste souligne que bien que l'expression «Gilets jaunes» soit entrée dans le vocabulaire des Français, aucun de ces deux mots n'a été prononcé par leur Président dans les discours analysés.
Discours du 1er décembre
En ce qui concerne l'allocution de M.Macron prononcée en Argentine, Helios Jaime propose d'en analyser la fin: «Je respecterai toujours les contestations. J'entendrai toujours les oppositions mais je n'accepterai jamais la violence».
M.Jaime remarque que le Président a conjugué les verbes de la phrase au futur simple, tandis que «l'adverbe ʺtoujoursʺ ne fait que prolonger, dans le futur, les attitudes qu'il évoque».
En outre, l'expert met l'accent sur le choix du verbe «entendre» par opposition au verbe «écouter».
«On peut entendre un bruit sans y prêter beaucoup d'attention, mais ʺécouterʺ désigne le fait d'être attentif à ce qu'on dit. Cette différence sémantique serait-elle une des raisons pour lesquelles M.Macron ne mentionne pas les Gilets jaunes?», s'interroge-t-il.
Discours du 10 décembre
Emmanuel Macron centre «la première partie de son discours sur la répression des violences qui, d'après lui, profitent aux opportunistes et aux politiques. Mais M.Macron n'indique pas qui sont ces opportunistes, ni ne précise les noms des partis ou de dirigeants politiques», poursuit le linguiste.
Ensuite, le Président «attribue la détérioration du niveau de vie à la politique menée pendant les dernières quarante années» en soulignant qu'il voulait le changer «par le biais des réformes réalisées durant les dix-huit mois de son gouvernement».
«Mais, il ne mentionne pas le fait que les manifestations revendicatives des Gilets jaunes ont été déterminées par ces réformes», s'étonne-t-il.
Puis, l'écrivain met en lumière le fait que «M.Macron s'adresse d'une manière quasi individuelle aux citoyens, il n'emploie pas le nom ʺpeupleʺ, mais le pronom personnel ʺvousʺ».
«Mais, comme il ne mentionne ni le peuple ni la nation, le pronom ʺvousʺ pourrait se limiter à désigner ceux qui ont voté pour lui en excluant, dans ce cas, les Français qui n'ont pas voté pour lui», estime M.Jaime.
Pétition sur le prix des carburants sur Change.org
Enfin, concernent la réponse du Président à la pétition sur le prix des carburants sur Change.org, le linguiste met en exergue quelques points sur lesquels le Président est resté vague.
«Puis, il reconnaît qu'"au bout de 18 mois d'action, les changements que nous menons sont loin d'être suffisamment perceptibles". Mais, le fait qu'ils ne soient pas assez perceptibles n'implique pas que ces changements soient erronés. Cela pourrait laisser supposer que son gouvernement garderait les mêmes lignes directrices de sa politique qui ont motivé les protestations», suppose l'expert.
Conclusion
Finalement, Hélios Jaime en vient à la conclusion que «les principaux messages que les discours de M.Macron transmettent sont la répression des violences sans préciser les moyens ni identifier les coupables, l'acceptation d'une colère populaire qui donne lieu à certaines mesures pour apaiser les réclamations des Gilets jaunes, l'invitation au dialogue».
«L'analyse des moyens linguistiques et sémantiques employés dans ces trois discours met en évidence le propos de persuader les Gilets jaunes de la bonne intention de son gouvernement sans pour autant présenter d'une manière concrète le moindre changement des lignes directrices de la politique que celui-ci mène», conclut l'interlocuteur à Sputnik.