Trop "de rumeurs circulent autour du groupe Wagner, alors que cette société demeure fantomatique"

© Photo Alexandre Ivanov, président de la Communauté des Officiers pour la Sécurité internationale (COSI)Monument aux alliés russes à Bangui
Monument aux alliés russes à Bangui - Sputnik Afrique, 1920, 10.12.2021
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"Beaucoup de rumeurs, mais que des rumeurs sans la moindre preuve matérielle, circulent autour du groupe Wagner, alors que cette société demeure fantomatique", affirme à Sputnik Alexandre Ivanov, président de la Communauté des officiers pour la sécurité internationale, qui emploie les instructeurs russes en République centrafricaine.
Le 17 octobre 2021, lors d’une déclaration à la presse, Jean-Yves Le Drian assurait que la présumée société de sécurité privée russe "Wagner fait la guerre par procuration pour le compte de la Russie".
Selon lui, les militaires de cette société, "lorsqu’ils pénètrent dans un pays, y multiplient les violations, les exactions, les prédations pour se substituer parfois même à l’autorité du pays. L’exemple le plus spectaculaire c’est la République centrafricaine (RCA) où finalement, pour pouvoir se payer, ils confisquent la capacité fiscale de l’État".
Le 19 octobre, dans une déclaration à l’AFP, la ministre centrafricaine des Affaires étrangères, Sylvie Mbaïpo-Temon, s’est dite "stupéfaite" de la réaction "extrême" et "mensongère" de son homologue français. De leur côté, les autorités russes ont démenti à plusieurs reprises ces accusations largement diffusées par les médias mainstream. Les responsables russes, qui confirment la présence de 1.135 instructeurs en République centrafricaine, réfutent cette confusion sciemment entretenue entre leurs militaires et les mercenaires de sociétés privées.
Sous quel enseigne opèrent ces instructeurs russes en RCA? En quoi consiste leur travail, comment se déroule-t-il et quels sont les résultats obtenus sur le terrain depuis leur arrivée en 2017 dans le pays? Y a-t-il effectivement des sociétés de sécurité privées russes en RCA ou ailleurs, comme au Mali? Le groupe "Wagner" existe-t-il vraiment? Est-il responsable de tout ce qui lui ait reproché par les Occidentaux, notamment les autorités françaises? La France n’est-elle pas en train d’essayer d’empêcher la Russie de coopérer avec l’Afrique, notamment en République centrafricaine et au Mali?
Pour répondre à ces questions, Sputnik a sollicité Alexandre Ivanov, président de la Communauté des officiers pour la sécurité internationale (COSI), "l’organisme sous l’égide duquel interviennent les instructeurs russes en RCA". Selon lui, "il s'agissait d'une demande officielle du gouvernement centrafricain, acceptée par son homologue russe. Le déploiement, tout à fait légal, de ces instructeurs s’est fait dans le cadre d’un commun accord entre les gouvernements russe et centrafricain".

Les soldats français ont-ils échoué à pacifier la RCA?

En 2014, la France a déployé une force armée en République centrafricaine suite au déclenchement de la guerre civile en 2013, qui a mis en déroute l’armée du pays. Fin octobre 2016, François Hollande, alors Président de la République, ordonna la fin de cette opération nommée Sangaris. Jean-Yves Le Drian, alors ministre français de la Défense, assurait que Sangaris avait rempli ses trois missions: "mettre fin au chaos, accompagner la montée en puissance des forces internationales et permettre la tenue d'élections démocratiques". Or, une année après, les groupes armés ont repris le contrôle d’environ 80% du territoire du pays.
© Photo Alexandre Ivanov, président de la Communauté des Officiers pour la Sécurité internationale (COSI)Remise de la Note de remerciement de l'Assemblée nationale à Alexandre Ivanov
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© Photo Alexandre Ivanov, président de la Communauté des Officiers pour la Sécurité internationale (COSI)Discussion sur la sécurité en RCA avec des journalistes Centrafricains
Discussion sur la sécurité en RCA avec des journalistes Centrafricains - Sputnik Afrique
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Discussion sur la sécurité en RCA avec des journalistes Centrafricains
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Discussion sur la sécurité en RCA avec des journalistes Centrafricains
En septembre 2017, en marge de l’Assemblée générale de l’Onu, le Président centrafricain Faustin-Archange Touadéra a déclaré à France24 que le départ de la force Sangaris était "prématuré". Selon lui, "l'armée centrafricaine doit se reconstruire. Aujourd’hui, il faudrait renforcer la capacité des Casques bleus de l’Onu", estimant qu’il faudrait "trois ou quatre contingents supplémentaires" pour couvrir les besoins sécuritaires du pays. Ainsi, en octobre 2017, suite à une rencontre à Sotchi entre le Président Touadéra et Sergueï Lavrov, un accord de défense portant sur le renforcement des capacités militaires de l’armée centrafricaine a été conclu, ouvrant la porte à l’arrivée des instructeurs de la COSI.
M.Ivanov rappelle qu’"à cette époque, le pays était dans une crise prolongée. Les forces de sécurité n'étaient pas suffisamment préparées pour résister aux hordes de bandits éparses qui déchiraient le pays. Nos instructeurs se trouvent sur le territoire de la RCA avec une mission officielle de former les Forces armées centrafricaines (FACA), en leur apportant conseil et assistance, y compris dans le domaine humanitaire".
Et d’expliquer que "la tâche principale assignée à nos instructeurs est de former l'armée nationale aux bases du combat, à l'utilisation des armes ainsi qu'à la stratégie et à la tactique. Nous aidons également à organiser la logistique et le renseignement. Nous formons les FACA à mener des opérations, quelle que soit leur complexité. Par ailleurs, nous assurons la formation de la gendarmerie, de la police et des gardes-frontières à la lutte contre la contrebande et les transits frontaliers illégaux".

"Des résultats remarquables"

Après quatre ans de présence en RCA, "je peux dire avec certitude que les résultats obtenus par nos instructeurs sont remarquables. Le plus édifiant est la réussite des FACA à repousser les attaques de la coalition des formations de bandits en décembre 2020 et dans les mois suivants. L'armée nationale a eu l'occasion de prouver ses nouvelles capacités grâce à la formation de nos spécialistes", expose le président de la COSI.
Et d’ajouter que "récemment, la COSI a reçu un prix de l'Assemblée nationale" en guise de "gratitude à l’égard de nos instructeurs pour leur soutien décisif dans les moments difficiles. Le 1er décembre, un monument a été érigé en l'honneur des instructeurs russes qui ont formé l'armée centrafricaine à la lutte contre le terrorisme et le banditisme, ce qui a permis de libérer la plupart des territoires du pays".
Dans le même sens, Alexandre Ivanov précise que "la COSI est exclusivement présente en RCA. À cet effet, les supposés pourparlers entre le gouvernement malien avec de prétendues sociétés privées russes nous parviennent, comme tout le monde, via les médias. Néanmoins, il faut savoir que le recours à des sociétés de sécurité privées est une pratique largement répandue dans le monde. Au Mali, même l'Onu recrute auprès des sociétés privées (la britannique G4S Global et l’américaine Relyant) pour faciliter le travail des Casques bleus".

"Wagner" ou le "Crépuscule des dieux"?

Le 6 décembre, en marge de l’ouverture du 7e Forum sur la paix et la sécurité en Afrique, à Dakar, la ministre française des Armées s’est exprimée lors d’un entretien à RFI sur les incidents ayant perturbé le passage d’un convoi de la Force Barkhane au Burkina Faso et au Niger, accusée par des manifestants "de transporter des armes pour des terroristes". Tout en réfutant ces allégations, Florence Parly a affirmé qu’"il y avait un certain nombre de compétiteurs qui sont évidemment à la manœuvre. Et d’ailleurs on les retrouve aussi à la manœuvre au Mali. Puisque comme vous le savez, ça fait des semaines maintenant que la rumeur selon laquelle une société de mercenaires russes qui s’appelle +Wagner+ est susceptible de se déployer au Mali […]. Aujourd’hui, je ne pense pas qu’ils soient à Bamako, mais cela ne signifie pas qu’il n’y ait pas une intention de la part des autorités maliennes actuelles de les y faire venir".
Alexandre Ivanov, chef de la Communauté des officiers pour la sécurité internationale - Sputnik Afrique, 1920, 29.06.2021
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"Effectivement, beaucoup de rumeurs, mais que des rumeurs sans la moindre preuve matérielle, circulent autour du groupe +Wagner+, alors que cette société demeure fantomatique et n’a aucune existence sur le terrain", explique Alexandre Ivanov, ponctuant que "l'histoire de ce groupe relève plutôt des domaines du mythe et de la légende. Même chez les Africains, Wagner est présent dans l’imaginaire comme un superhéros, dont ils attendent la venue pour les aider à vaincre tous les bandits et à retrouver, enfin, une vie paisible. Les Occidentaux ont également leur propre histoire mythologique effrayante sur Wagner, peut-être inspirée de l’opéra du +Crépuscule des dieux+?".
Enfin, il estime que "si les groupes armés qui terrorisent la RCA n'avaient pas le soutien de la campagne médiatique venant de Paris, ils auraient saisi depuis longtemps la futilité de leurs activités criminelles. Je pense que l'image des +méchants russes+ permet au gouvernement français d'attribuer ses échecs, [aussi bien de Sangaris que de Barkhane, ndlr] à une menace extérieure".
"Cette image de guerre, artificiellement créée, imposée par les médias occidentaux, vise à promouvoir des intérêts géopolitiques", avance-t-il. Et de conclure: "Nous sommes ouverts à la coopération internationale, mais nous travaillons aussi avec nos avocats à défendre notre réputation devant les tribunaux".
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