Quatre ans de prison requis contre Sarkozy: «c’est se moquer du monde» selon Me Goldnadel

© REUTERS / CHARLES PLATIAUNicolas Sarkozy au Tribunal Correctionnel de Paris le 23 Novembre 2020, pour le procès «Bismuth».
Nicolas Sarkozy au Tribunal Correctionnel de Paris le 23 Novembre 2020, pour le procès «Bismuth». - Sputnik Afrique
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Le procès visant Nicolas Sarkozy pour «trafic d’influence» et «corruption active» touche à sa fin. À deux jours du délibéré, le Parquet national financier a requis quatre ans de prison, dont deux avec sursis, pour chacun des prévenus. Une peine historique si elle venait à être prononcée. Et une injustice, selon l’avocat Gilles-William Goldnadel.

Mardi 8 décembre: l’affaire des écoutes, dite «Paul Bismuth», a pris un nouveau tournant.

Les trois protagonistes mis en cause dans cet abus de pouvoir présumé, et parmi eux Nicolas Sarkozy, ancien Président de la République, risquent maintenant deux ans de prison ferme. C’est en tout cas ce qu’a réclamé le Parquet national financier, souhaitant appliquer une peine exemplaire pour des faits «qui ont été commis par des hommes dont l’engagement professionnel et politique était de très haut niveau.»

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Pour le PNF, ces derniers auraient aussi «considérablement froissé le tissu institutionnel que constitue l’État de droit». Une aberration pour Maître Gilles-William Goldnadel, avocat et essayiste, qui admet lui-même être «proche des accusés». Selon lui, la réquisition du parquet repose sur des écoutes illégales:

«Je ne décolère pas sur cette décision de la Cour de cassation, qui a validé des écoutes entre un avocat et son client. Or il n’y a rien de plus sacré que ce genre de conversations, qui sont comme le secret de la confession», déclare-t-il à Sputnik.

Ouvert le 23 novembre, ce procès met en cause l’ancien Président, son avocat Thierry Herzog et le magistrat Gilbert Azibert, dans ce qui débute en 2013 avec l’enquête sur le financement libyen de la campagne de 2007. Nicolas Sarkozy est alors mis sur écoute. Selon les juges, il en est rapidement informé, ainsi que son avocat, par Gilbert Azibert, ancien directeur de l’École nationale de la magistrature et avocat général à la Cour de cassation. Dès lors, ce dernier aurait fourni en informations confidentielles l’ancien Président et sa défense, et ces derniers auraient envisagé de lui accorder quelques faveurs pour l’en remercier, notamment l’obtention d’un poste à la Cour de révision de Monaco.

Une enquête illégale du Parquet?

Pourtant, l’enquête s’inscrirait dès le départ dans une posture frauduleuse orchestrée par la Cour de cassation, défend Gilles-William Goldnadel:

«Les écoutes sont la seule base de cette affaire, donc la Cour de cassation s’en est tirée en affirmant que rien ne permettait de prouver que M. Herzog est l’avocat de M. Sarkozy. C’est se moquer du monde, car Maître Herzog est son avocat historique, tout le monde le sait.»

Au-delà de l’affaire, c’est «l’un des fondements les plus importants du droit» qui est remis en cause selon Me Goldnadel.

© AFP 2023 JOEL SAGETMe Gilles-William Goldnadel
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Me Gilles-William Goldnadel

Me Goldnadel a du mal à croire à l’impartialité du parquet. Notre interlocuteur admet toutefois ne pas être totalement objectif, Nicolas Sarkozy et Thierry Herzog comptant en effet parmi ses «amis». Aussi confie-t-il avoir lui-même convaincu «le vrai Paul Bismuth» (le nom d’un ancien camarade de Thierry Herzog utilisé par celui-ci pour acheter des cartes SIM) de ne pas se constituer partie civile lors du procès.

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Quant à la peine réclamée, il s’agit de la plus importante jamais encourue par un Président de la République française, un traitement disproportionné dénoncé par l’intéressé lui-même. «Parce que je suis Nicolas Sarkozy, parce que j’ai été Président de la République, on a le droit de piétiner mes droits?» s’est-il ainsi emporté, tandis que le procureur adjoint, Jean-Luc Blachon, a de son côté nié tout esprit de «vengeance» de la part du parquet.

Une condamnation politique en vue

Un jugement dont la neutralité est remise en cause par plus d’un, et une réquisition qui semble disproportionnée.

Me Goldnadel dénonce pour autant une peine qui, juridiquement, ne tiendrait pas si d’aventure elle était prononcée:

«Quatre ans de prison pour ce qui est considéré comme de la délinquance sommaire? Pour des gens qui n’ont jamais été condamnés pour ces faits? C’est impossible, je prends tous les paris que s’ils étaient condamnés à ces peines, la Cour européenne des droits de l’homme condamnera la France pour avoir utilisé des écoutes illégales. C’est dire à quel point c’est grave! Ça transcende largement le sort des prévenus», prévient G.W. Goldnadel.

La spirale infernale, enclenchée il y a plus de six ans se poursuit donc au tribunal judiciaire de Paris, où les audiences reprendront ce jeudi 10 décembre et où le sort des accusés devrait être définitivement tranché… au moins jusqu’à l’éventuel renvoi en appel.

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