Les chercheurs brésiliens Mathias Alencastro et José Henrique Bortoluci ont publié vendredi 4 décembre une tribune dans Le Monde dans laquelle ils plaident pour une coopération entre la France et la société civile brésilienne pour faire avancer l'agenda climatique.
Alors que les relations tendues depuis 2018 entre le Brésil et la France suite aux incendies en Amazonie et au Pantanal et à l'avancée de la déforestation ont peu de chance de s'améliorer étant donnée la protection accordée à Jair Bolsonaro par Donald Trump, l'arrivée au pouvoir de Joe Biden devrait changer complètement la donne, signalent les auteurs.
«Désormais, Paris peut compter sur un allié à Washington pour faire avancer l’agenda climatique au Brésil.»
Ne pas tomber dans les pièges créés par sa propre position
Ils estiment que pour réussir la France doit cependant éviter de tomber dans les pièges créés par sa propre position ambiguë en Amérique du Sud car elle est à la fois une puissance et un acteur régional qui contrôle une importante partie du territoire amazonien, la Guyane.
«En 2019, le Président Emmanuel Macron a perdu une partie du soutien de l’opinion publique brésilienne quand il a évoqué le sujet d’un statut international de l’Amazonie qui rappelle, pour les Brésiliens, les projets d’internationalisation de l’espace national de la fin du XIXe siècle», expliquent les chercheurs.
Ils proposent une autre approche pour le Brésil actuel qui vit le paradoxe d’avoir au sommet de l’État un des chefs de file du négationnisme climatique et, en même temps, une société civile, un secteur privé et un milieu universitaire conscients de l’urgence.
Se tourner vers les acteurs sur place
Les chercheurs constatent que l'impact d'une politique environnementale réaliste et sans tabou, passant par un dialogue exigeant avec Brasilia, poursuivie depuis trois ans par Emmanuel Macron, «est souvent mitigé en raison de la posture de Jair Bolsonaro, maître dans l’art de noyer les débats techniques dans des insultes et agressions».
«Au lieu d’assumer le risque de renforcer les factions nationalistes et le projet politique de Bolsonaro, la France doit se tourner vers les acteurs sur place, qui sont déjà dans l’action face au défi climatique.»
Les deux auteurs appellent les puissances européennes à ne pas juger les sociétés civiles des pays du Sud comme mal placées pour faire face à leurs gouvernements respectifs.
«Ce n’est pas le cas au Brésil. Malgré Bolsonaro, nous sommes encore une démocratie vibrante et notre société est préparée pour faire face aux plus grands défis du siècle», concluent les chercheurs.