Au Cameroun, les vendeurs de «porte-monnaie magiques» font fureur sur la Toile

© Sputnik . Roland KlohiDes billets de francs CFA de la zone UEMOA
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Le phénomène du porte-monnaie magique a pris d’assaut le web au Cameroun. Proposés sur Internet par de prétendus marabouts béninois, ces gadgets seraient capables, à en croire ces derniers, de générer des billets de banque comme par enchantement. La recette attire les jeunes avides de réussite facile et alimente les fantasmes dans le pays.

C’est devenu monnaie courante au Cameroun: des quidams qui, sur Internet, proposent des portefeuilles miracles à même de dupliquer les billets de banque. Cette nouvelle arnaque numérique attribuée à des marabouts –qui se présentent très souvent comme originaires du Bénin, sans que cette assertion ne se vérifie toujours.

Ce petit pays d’Afrique de l’Ouest est connu pour être le foyer ancestral d’une croyance occulte, le vaudou.

Ces derniers temps, ces marabouts 2.0 ont fait de la Toile leur principal débouché. Dans des groupes Facebook, sous des publications et même en messagerie privée, ils font le placement de leurs produits en en vantant les mérites.

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Vendus entre 100.000 (153 euros) et jusqu’à plus d’un million de francs CFA (1.538 euros), selon certains standards et en fonction du gain escompté, ces portefeuilles singuliers –que rien ne distingue, pourtant, de l’extérieur de n'importe quel autre portefeuille– doivent produire quantité de billets de banque chaque jour si son propriétaire consent en retour à certains sacrifices. Par exemple, pour que l’article tienne ses promesses, l’acheteur doit utiliser une certaine somme, dont le montant est fixé par son gourou, sous 24 heures.

Des techniques qui, selon le professeur Herman Nyeck Liport, parapsychologue et spécialiste de la métaphysique, sont réservées aux initiés et instrumentalisées par certains pour détourner l’argent des naïfs.

«Ce phénomène existe réellement mais il est réservé aux initiés et tout cela s’accompagne de pactes car rien n’est gratuit dans le paranormal. Ceci pour vous dire qu’un vrai  portemonnaie magique ne court pas les rues. Généralement, quand tu as un portefeuille magique, cela ne multiplie pas les billets mais cela te permet d’avoir en permanence des opportunités de gagner de l’argent», souligne-t-il au micro de Sputnik.

L’appât du gain facile

De plus en plus, des jeunes, d’une vingtaine d’années en général, sont tentés par ce raccourci qui mènerait à la réussite financière. À en croire de nombreux récits qui alimentent les réseaux sociaux, attirés par l’appât du gain facile, certains ont malheureusement mordu à l’hameçon. Florent M, 29 ans, promoteur d’une entreprise de design graphique, y a échappé de justesse.

«Un marabout béninois m’avait contacté sur Messenger pour me proposer un porte-monnaie magique à 500.000 francs CFA (769 euros). Nous avons échangé. J’étais intéressé au départ mais au moment de conclure l’affaire, je me suis rétracté», relate-t-il à Sputnik.

Florent dit avoir été sauvé grâce à ses «valeurs chrétiennes». Dans l’opinion au Cameroun, le phénomène prête le flanc à toutes sortes de commentaires. Beaucoup, comme Laetitia De Bilong, jeune commerciale dans une entreprise à Yaoundé, déplorent «cette nouvelle tendance qui trouve un terreau fertile au sein de la jeunesse. Et c’est déplorable». Pour Max Pascal Owona, le porte-monnaie magique est un gros traquenard.

«Le piège de la facilité est grand dans nos sociétés consuméristes et capitalistes qui mettent la logique transactionnelle au cœur des rapports humains. Seulement, que cela existe ou pas, si quelqu’un vous offre une source illimitée d’argent, que peut-il attendre en retour si ce n’est un sacrifice diabolique?» s’interroge-t-il.

Les contraintes de la société de consommation

Depuis l’apparition des réseaux sociaux, le phénomène tend à se généraliser. Des prétendus apporteurs de richesse ont envahi la Toile à la recherche de potentiels clients intéressés par leur portefeuille miracle.

Pour le professeur Adolphe Messanga, psychosociologue et enseignant à l’Université de Dschang, ces vendeurs d’illusions profitent de la vulnérabilité d’une jeunesse désargentée mais soumise aux contraintes de la société de consommation.

«La problématique qui revient dans le milieu jeune aujourd’hui en Afrique, c’est comment faire pour remplir les obligations qu’exige la société, c’est-à-dire manger, se vêtir, se soigner. Mais face à ces obligations, il se pose souvent un problème de moyens financiers. Et vu la rareté de l’emploi chez nous, certains jeunes peuvent être tentés par des pratiques comme les porte-monnaie magiques», analyse-t-il pour Sputnik.

Si les jeunes y cèdent si facilement, la société en général n’est pas totalement exempte de tout reproche. Pour le spécialiste, les réseaux sociaux sont devenus le lieu d’exposition des réussites sociales qui excitent des convoitises. «Le culte de l’argent est plus valorisé que le culte de l’effort et du travail», conclut-il.

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