Le Président et le 1er ministre libanais savaient «que ça pouvait détruire Beyrouth si ça explosait»

© REUTERS / Aziz TaherNewly elected Lebanese president Michel Aoun sits on the president's chair inside the presidential palace in Baabda, near Beirut, Lebanon October 31, 2016
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«Je les ai avertis que ça pouvait détruire Beyrouth si ça explosait», a confié à Reuters une source sécuritaire libanaise haut placée, dévoilant l’existence d’une lettre confidentielle transmise au Président Aoun et au Premier ministre Diab en date du 20 juillet.

Le Président libanais Michel Aoun et le chef du gouvernement Hassan Diab étaient au fait depuis le 20 juillet de la présence de 2.750 tonnes de nitrate d’ammonium dans le port de Beyrouth, affirment auprès de Reuters deux sources sécuritaires haut placées sous couvert d’anonymat. Elles précisent qu’un rapport, que Reuters dit avoir consulté, leur a été transmis, mettant en garde contre le risque que constituait ce stock qui «peut détruire la capitale s’il explose».

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Reuters indique qu’un rapport en date du 20 juillet de la Direction générale de la sécurité de l'État en date du 20 juillet a été adressé au Président Aoun et à son Premier ministre Diab. Le document résume les conclusions d’une enquête judiciaire ouverte en janvier et dirigée par le procureur général Ghassan Oweidat. Il y demande aux autorités de sécuriser immédiatement le stock de nitrate d’ammonium se trouvant au port de Beyrouth après que des manquements aux consignes de sécurité ont été constatés.

Plus troublant encore, l’une des deux sources confie au média qu’une lettre privée destinée au chef de l’État et au Premier ministre a été jointe au rapport. Elle souligne que les deux hommes ont été mis au courant personnellement et sommés d’agir en urgence.

«Je les ai avertis»

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«Il y avait un risque que ce matériau, s'il était volé, puisse être utilisé dans une attaque terroriste», expose le responsable sécuritaire qui prétend avoir participé à la rédaction de la lettre en question.

«Je les ai avertis que ça pouvait détruire Beyrouth si ça explosait», ajoute-t-il.

Contactés par Reuters au sujet de cette lettre confidentielle, les cabinets du Président de la République et du Premier ministre se sont refusés à tout commentaire.

En janvier, suite à la découverte d’un trou dans un mur du hangar où étaient stockées les 2.750 tonnes de nitrate d’ammonium et la constatation que l’une de ses portes était abîmée, une enquête a été ouverte par un juge et confiée au procureur général Ghassan Oweidat, détaille la seconde source auprès de Reuters. Elle précise que le hangar n’était même pas surveillé.

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À l'issue de l'enquête, dans son rapport final, le procureur général Oweidat demande que «des travaux de rénovation des murs et de la porte endommagée soient immédiatement lancés, afin d’empêcher tout risque de vol», explique cette source. Le procureur exige également que le hangar soit surveillé, ponctue-t-elle.

«Je ne suis pas responsable!»

La semaine dernière, le Président Michel Aoun a déclaré à la presse qu’il avait été informé de la présence du stock de nitrate d’ammonium dans le port de Beyrouth, rapportait Reuters. Il dit avoir ordonné au secrétaire général du Conseil Suprême de la Défense (conseil regroupant toutes les agences de sécurité et militaires libanaises sous l’autorité du chef de l’État) de «faire le nécessaire».

«La Direction générale de la sécurité de l'État avait dit que c'était dangereux. Je ne suis pas responsable! Je ne sais pas où il a été placé [le stock de nitrate d’ammonium, ndlr] et je ne savais pas à quel point c'était dangereux», se justifiait alors le Président Aoun. «Je n'ai aucune autorité pour traiter directement avec le port. Il y a une hiérarchie et tous ceux qui savaient auraient dû assumer leurs responsabilités pour faire le nécessaire», concluait-il.

Le dernier bilan officiel en date du 4 août fait état de 158 morts, 6.000 blessés et près de 300.000 sans-abris.

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