Le «A» de anarchie sur la plaque en hommage à Xavier Jugelé, «J’ai eu les larmes aux yeux»

© SputnikRassemblement en hommage à Xavier Jugelé, policier tué en 2017 par un terroriste sur les Champs-Elysées
Rassemblement en hommage à Xavier Jugelé, policier tué en 2017 par un terroriste sur les Champs-Elysées - Sputnik Afrique
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Plusieurs rassemblements se sont déroulés ce 20 mars à travers le pays pour rendre hommage à Xavier Jugelé, policier tué en 2017 par un terroriste sur les Champs-Elysées et dont la stèle a été vandalisée par des casseurs en marge de l’Acte 18 des Gilets jaunes. L’occasion pour les policiers de crier leur colère au micro de Sputnik France.

«Xavier Jugelé est un héros de la France. On a porté atteinte à l'honneur d'un héros, de ses proches, de sa famille, de son mari et de la police dans son intégralité. Il a laissé sa peau pour lutter contre le terrorisme, c'est honteux. On a vraiment affaire à une horde d'assassins en face de nous.»

Yves Lefèvre, secrétaire général du syndicat Unité-SGP Police Fo est très remonté. Ce 20 mars, il était sur les Champs-Elysées afin de rendre hommage au policier Xavier Jugelé. Le 20 avril 2017, ce dernier avait été assassiné par un terroriste sur la célèbre avenue parisienne. Une plaque commémorative avait par la suite été installée pour lui rendre hommage. C'est cette même plaque qui a été vandalisée en marge de l'Acte 18 des Gilets jaunes par des casseurs qui ont tagué le «A» de «anarchie».

«J'ai eu les larmes aux yeux en voyant ça», s'indigne Yves Lefèvre.

Ce symbole est prisé de certains membres de l'extrême gauche et des tristement célèbres Black Blocs, qui ont été à la manœuvre le 20 mars sur les Champs-Élysées, où de nombreux dégâts ont été commis. Deux autocollants «Action antifasciste» et «État d'urgence citoyenne» ont également été collés sur la plaque avant son nettoyage.

​Linda Kebbab, déléguée syndicale FO, est venue assister à la cérémonie. Elle s'interroge et s'«indigne» à propos «des valeurs de ce pays aujourd'hui»:

«On était censé avoir un consensus sur la lutte contre le terrorisme et dans la dénonciation des actes terroristes, que ce soit à l'encontre des policiers comme de tout autre citoyen. On se rend compte que l'on a une frange de la population qui peut, aujourd'hui, faire éclater au grand jour son mépris de la lutte contre le terrorisme. Notamment vis-à-vis d'une personne qui a donné sa vie pour sauver celle des autres.»

Entre 100 et 200 personnes étaient présentes sur la plus belle avenue du monde dont beaucoup de policiers, pour certains des ex-collègues de Xavier Jugelé ou des proches. Étienne Cardiles, veuf du policier assassiné, a porté plainte après le saccage de la plaque commémorative, relate Le Parisien. L'ancien commissaire Robert Broussard, meilleur ennemi du braqueur Jacques Mesrine, était aussi présent de même que Geoffroy Boulard, maire Les Républicains du XVIIe arrondissement.

​Des gerbes de fleurs ont été déposées au pied de la plaque. D'autres rassemblements ont eu lieu à travers le pays comme devant le commissariat de Strasbourg ou encore à Narbonne ou Épinal.

​​Le rassemblement de Paris a également été l'occasion de deviser sur les raisons du saccage des Champs-Elysées le 16 mars par des groupes de casseurs. Kiosques et banque incendiés, volées de pavés et autres pillages ont rythmé l'après-midi et la réponse des forces de l'ordre a été clairement critiquée.

«On en est arrivé là par des ordres incohérents. On pensait avoir vécu le pire le 1er décembre. Le 8 décembre, ça s'était somme toute bien passé pour les forces de l'ordre et pour les manifestants pacifiques qui venaient légitimement revendiquer plus de pouvoir d'achat, de meilleures conditions de vie et de meilleures retraites, bref, les Gilets jaunes pacifiques dans leur immense majorité. Depuis, on a laissé passer du temps, la préfecture de police de Paris a pensé que tout cela était derrière elle. Et samedi 16 mars, les ordres ont été mauvais. On a subi le manque de réactivité et le manque de moyens mis à notre disposition. Je ne remets pas en cause le volume, car on demande à ce que nos collègues puissent se reposer. Samedi, il fallait entre autres mettre les escadrons de gendarmes mobiles à la garde du fameux triangle Elysée-Beauvau-Assemblée nationale et mettre les CRS à la manœuvre. On sait qu'ils sont plus opérationnels que les gendarmes mobiles dans ce genre d'exercice», explique Yves Lefèvre.

Le policier se félicite que des têtes soient tombées. Notamment celle de Frédéric Dupuch, directeur de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP), qui va être remplacé. Pour Yves Lefèvre, ce dernier a fait «tout et n'importe quoi et mis en danger la vie des policiers» le 16 mars. Michel Delpuech a également fait les frais de la colère de l'exécutif. Le désormais ex-préfet de police de Paris a été remplacé par Didier Lallement.

«Sur un maintien de l'ordre, sauf s'il y a une situation de légitime défense, les policiers n'ont pas l'initiative d'intervenir. Ils n'agissent que sur ordre. Il y a eu un dysfonctionnement de la part des autorités de la préfecture de police, le gouvernement l'a reconnu. Nous avons eu des remontées du terrain de nos collègues qui étaient sur les Champs et qui nous ont fait part de dysfonctionnements entre deux directions de la préfecture de police: la Direction de l'ordre public et de la circulation (DOPC) d'un côté et la Direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP) de l'autre. Il n'y a pas eu de transversalité dans la communication des informations», explique Denis Jacob d'Alternative Police CFDT.

D'après les révélations du Canard enchaîné, le Président a particulièrement mal pris les violences du 16 mars. «La riposte policière n'a pas été à la hauteur et la responsabilité du gouvernement est clairement engagée. Rien ne peut expliquer que, pendant des heures, les Champs-Elysées aient été laissés à des voyous», a tempêté le locataire de l'Élysée à ses conseillers, relate le journal satirique.

​«Vous n'avez rien d'autre à me proposer qu'un dispositif conçu en décembre que vous avez négligé d'appliquer aujourd'hui. Je vous conseille de vous mettre sérieusement au travail», a lancé Emmanuel Macron en pleine cellule de crise place Beauvau, après avoir écouté «Philippe, Belloubet, Casta, Nunez, et les chefs flics» selon Le Canard enchaîné.

Une nouvelle doctrine du maintien de l'ordre

La radicalisation qui toucherait une partie des Gilets jaunes était sur beaucoup de lèvres ce 20 mars. Denis Jacob assure qu'une partie des Gilets jaunes est devenue plus violente.

 

Il réfute les arguments de ceux qui parlent de casseurs qui n'auraient rien à voir avec le mouvement, comme la journaliste Natacha Polony.

«Nous avons une majorité de Gilets jaunes qui sont des gens pacifiques, qui portent des revendications dans lesquelles les policiers se retrouvent. Le problème du pouvoir d'achat, cela concerne tout le monde. Sauf que, aujourd'hui, nous n'avons plus affaire aux mêmes Gilets jaunes. C'est une frange très radicale.»

Il parle d'une «extrême minorité» tout de même «présente» de casseurs parmi les Gilets jaunes et d'une «majorité silencieuse qui soutient toujours la police». D'après le gardien de la paix, des «manipulations politiques d'extrême gauche et d'extrême droite» ont influencé le mouvement et «abusé de la faiblesse de gens qui sont dans la détresse».

Pour Linda Kebbab, il devient urgent de «trouver des solutions afin que ces idées nauséabondes, qui dans certains pays conduisent à des situations déplorables et dangereuses, ne viennent pas gangréner notre démocratie». «Ces anarchistes sont censés défendre les thèses de Proudhon, mais sont en fait des programmateurs du désordre social absolu», lance la policière. Avant d'ajouter:

«Ce qui nous choque au-delà de la dégradation, c'est l'absence de consensus des politiques sur la dégradation de cette plaque et il y a des représentants du peuple, qui siègent notamment à l'Assemblée nationale, qui n'ont pas eu un mot sur cette dégradation.»

Elle reproche également aux leaders des Gilets jaunes «leur manque de prise position claire» face à cet incident et fustige un climat de «scission idéologique qui veut que nous sommes dans l'absolu et le dénigrement constant».

​Concernant la suite du mouvement, les mesures annoncées par Édouard Philippe pour lutter contre les violences en marge des manifestations ont été globalement bien accueillies par les policiers interrogés. En plus de détachements anti-casseurs ou d'une autonomie accrue sur le terrain pour les forces de l'ordre, ces dernières auront plus de moyens comme l'emploi de davantage de drones ou de produits marquants.

«J'espère que les mesures décidées par Édouard Philippe sur impulsion de Christophe Castaner et de Laurent Nunez permettront de mettre un terme définitif à ces hordes de casseurs, d'assassins dès samedi», explique Yves Lefèvre.

«Les annonces gouvernementales qui ont été faites répondent à ce que nous demandions depuis quatre mois», lance pour sa part Denis Jacob. Mais il ne s'emballe pas: «On verra comment cela sera mis en œuvre le 23 mars.»

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