Des officiers de PJ se disent obligés «d’accepter des instructions illégales»

© AFP 2023 JACQUES DEMARTHON A French flag and a board indicating the police station of Vincennes, a southeastern Paris suburb, are pictured on March 5, 2012.
A French flag and a board indicating the police station of Vincennes, a southeastern Paris suburb, are pictured on March 5, 2012. - Sputnik Afrique
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Deux officiers de police judiciaire se sont confiés à Mediapart sur des instructions imposées par leur état-major lors des manifestations des Gilets jaunes. Avec ordre de placer «systématiquement» des manifestants interpellés en garde à vue, ils qualifient ces consignes d’«illégales».

Des officiers de police judiciaire de Paris dénoncent des consignes «liberticides» que leur impose leur hiérarchie, notamment lors des manifestations des Gilets jaunes. Ils avaient auparavant interrompu leurs activités, pendant plus d'un mois, pour protester contre ces instructions.

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Le 9 mars, ils ont reçu un courrier de l'état-major qui stipule, suivant les indications de la préfecture de police de Paris, qu'après «les éventuelles interpellations "GJ" qui [leur] seront attribuées par l'EM [l'état-major, ndlr], […] [les personnes, ndlr] devront être systématiquement placées en GAV [garde à vue, ndlr].

Selon Mediapart, il s'agit de la première preuve écrite de telles instructions.

L'un des officiers en question s'est confié au média en reportant de nombreuses «arrestations préventives».

«C'est-à-dire qu'en termes de droit, rien n'est respecté. Dans le mail que nous avons reçu, il est écrit noir sur blanc que l'état-major ordonne que la garde à vue doit être systématique. C'est complètement illégal», précise-t-il.

Selon lui, l'un des motifs de ces arrestations est de «participer sciemment à un groupement», infraction introduite en 2010 pour arrêter de manière préventive les «casseurs» et qui est passible d'une peine d'un an de prison et de 15.000 euros d'amende.

Mediapart rappelle que Rémy Heitz, procureur de la République de Paris, avait demandé aux procureurs dans sa note du 12 janvier intitulée «Permanence gilets jaunes» de maintenir en garde à vue des personnes dont le cas avait pourtant fait l'objet d'un classement sans suite afin d'empêcher les interpellés de manifester.

Le média a publié les témoignages d'un autre OPJ qui a refusé d'appliquer ces directives.

«Le judiciaire est devenu la boîte à outils du politique. Si on refuse d'obéir, en tant qu'OPJ, on est le fusible qui saute pour faute lourde. Du coup, on est obligé d'accepter des instructions illégales jusqu'au burn out ou à la dépression», indique-t-il.

L'officier estime que ces opérations ne contribuent pas à renforcer le maintien de l'ordre public mais l'affaiblissent.

D'après Mediapart, depuis un an et demi, les effectifs de police judiciaire se sont réduits de 17 officiers à six.

Les deux officiers qui ont parlé sous couvert de l'anonymat pensent que leurs témoignages déclencheront une enquête en interne pour retrouver ceux qui ont «osé contester la hiérarchie».

D'après le recensement des autorités, l'acte 17 du mouvement des Gilets Jaunes a réuni environ 30.000 participants en France. Il s'agit du niveau le plus bas depuis le début de la protestation. Depuis le début de la mobilisation, les chiffres officiels sont remis en cause par les manifestants. Le syndicat France Police-Policiers en colère affirme que quelque 160.000 personnes ont défilé à travers toutes la France pendant l'acte 17. Dans un communiqué, la préfecture a fait état de neuf interpellations et d'un blessé à la jambe parmi les forces de l'ordre.

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