L'antisémitisme, un problème autant européen que français

© AFP 2023 NIKLAS HALLE'N An Orthodox jew walks past a damaged door belonging to the Ahavas Torah synagogue in the Stamford Hill area of north London on March 22, 2015
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La question de l'antisémitisme et de son retour, qu'il soit fantasmé ou non, se pose en France, depuis l'agression d'Alain Finkielkraut et la publication des chiffres 2018. Pourtant, partout en Europe, la haine des juifs est à l'origine de scandales depuis deux mois, dessinant une tendance préoccupante à l'échelle du continent. Revue de détail.

L'antisémitisme est (re)devenu un sujet sociétal majeur, et ce, bien au-delà des frontières françaises. Si la parole du chef de l'État était attendue en France après la marche pour lutter contre l'antisémitisme du 19 février dernier, c'est dans toute l'Europe que les dirigeants s'attaquent désormais au problème. 

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Il faut dire que les actes antisémites médiatisés, à l'instar de l'agression d'Alain Finkielkraut, la profanation du cimetière de Quatzenheim ou les croix gammées taguées sur des portraits de Simone Veil, se multiplient un peu partout en Europe ces derniers temps et un rapport de l'Agence européenne pour les droits fondamentaux (FRA) met la pression sur les dirigeants politiques.

Dans un sondage commandé par la France et conduit dans 12 pays auprès de 16.000 citoyens européens, 89% des personnes interrogées ont estimé que l'antisémitisme est le problème le plus récurrent sur les réseaux sociaux et 70% d'entre eux considèrent que les politiques de lutte contre cette forme de racisme étaient inutiles. Des chiffres qui ont poussé le vice-président de la Commission européenne à se dire «profondément préoccupé» par les résultats obtenus:

«Il est essentiel que nous combattions vigoureusement et collectivement contre cette malédiction. La communauté juive doit se sentir en sécurité et chez elle en Europe», a déclaré Frans Timmermans.

Le problème, justement, c'est que les témoignages de haine à l'encontre de la communauté juive resurgissent aux quatre coins du vieux continent, au point que la Bulgarie ait fait de «la lutte contre le racisme, l'intolérance, le populisme et l'antisémitisme» l'un des points-clés de sa présidence de l'Union européenne, entamée début janvier.

Un mois avant, en Espagne, une affaire liée à l'antisémitisme avait fait couler beaucoup d'encre. Lors d'une opération qui a nécessité la coopération d'Europol et des forces de l'ordre helvètes, la police espagnole a en effet arrêté mi-décembre 2.018 trois personnes, après les avoir identifié comme les responsables d'un site néonazi «influent».

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Puis, au tout début de l'année, c'est aux Pays-Bas que le sujet est revenu. Une marche contre l'antisémitisme a été organisée à Utrecht, après que des organisations juives se soient plaintes de propos attisant la haine contre les juifs lors de manifestations propalestiniennes sur une des places principales d'Amsterdam. Un mouvement qui n'est pas sans rappeler la marche parisienne, dont l'organisateur a revendiqué 20.000 participants.

Dans le même temps, l'Italie a elle aussi eu droit à sa polémique nationale. Et cette fois, pas de quidam vociférant sa haine des juifs. Chez nos voisins transalpins, c'est le tweet d'Elio Lanutti, sénateur du Mouvement 5 Etoiles, dans lequel ce dernier fait un rapprochement entre le protocole des sages de Sion —un plan de conquête du monde par les juifs, paru en 1901 et attesté comme étant un faux- et le fondateur de la banque Rothschild, qui a provoqué une levée de boucliers des associations représentatives du judaïsme.

«J'ai attendu 24 heures avant d'intervenir. J'attendais une réaction, j'espérais que le Mouvement 5 Etoiles, comme tous les autres, prendrait position clairement contre l'antisémitisme», a déploré la présidente de la communauté juive de Rome, Ruth Dureghello.

Même au sein des pays considérés comme les plus fervents défenseurs d'Israël au sein de l'Union européenne, à savoir le groupe de Visegrad, des tensions liées à l'antisémitisme ont récemment resurgi. Alors qu'un sommet devait réunir le 18 février les représentants des quatre pays du groupe de Visegrad —la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie- et leur homologue israélien, Varsovie a annoncé qu'elle ne participerait pas en conséquence des déclarations du ministre des Affaires étrangères, Israël Kast. Ce dernier avait en effet déclaré quelques jours plus tôt que les Polonais étaient «allaités à l'antisémitisme»; une déclaration qualifiée de «message raciste impardonnable» par les conservateurs polonais au pouvoir.

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Enfin, le 18 février, sept députés du parti travailliste britannique ont annoncé leur décision de rejoindre le groupe indépendant à la Chambre des représentants, mettant en cause la gestion de Jeremy Corbyn concernant le Brexit tout en dénonçant une supposée «indulgence» du leader travailliste face aux démonstrations antisémites.
S'exprimant sur les raisons de son départ du groupe travailliste, la députée Luciana Berger a assuré que l'un des motifs l'ayant conduit à prendre cette décision était justement la «honte» qu'elle ressentait face à «l'antisémitisme institutionnel» dont elle avait été témoin.

La question de l'antisémitisme resurgit donc sur la place publique un peu partout en Europe à trois mois des élections européennes, bien que pour des raisons différentes dans tous les pays.

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