Best of 2018: Joachim Son-Forget appelle au courage politique et à l'innovation

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Au cœur de récentes polémiques pour ses tweets «sexistes» et son utilisation des réseaux sociaux, le député Joachim Son-Forget s'était entretenu avec Sputnik au début de l'année, alors qu'il briguait encore la présidence de LREM. Retour sur le portrait de cet électron libre de la politique à l'occasion du Best of 2018.

«Ah, j'aurais peut-être dû demander l'autorisation»

Déclarait Joachim Son-Forget, premier député LREM à s'adresser à Sputnik. L'homme faisait déjà, le 25 janvier dernier, au moment de cet entretien, figure d'électron libre du parti de la majorité. Ses récentes sorties sur les réseaux sociaux ont alimenté plusieurs polémiques, mais le médecin de formation, qui a quitté le groupe de la majorité le 29 décembre dernier, s'affichait il y a presque un an comme un soutien de la République en Marche depuis sa circonscription des Français de l'étranger.

Diplômé en sciences cognitives, il a participé à plusieurs études sur les méthodes d'apprentissage de la lecture. Son expérience, entre médecine et éducation, nous a amenés à l'interroger sur ces deux sujets qu'il affectionne et qui sont au cœur de l'actualité.

Éducation: «Il faut qu'il y ait une personnalisation de l'apprentissage, mais aussi que chacun ait les moyens de l'introspection.»

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Ancien candidat à la tête de LREM, Joachim Son-Forget se confie à Sputnik
Fort de ses connaissances dans le domaine des sciences cognitives, il défend une vision singulière de l'enseignement. Le député de la majorité se prononce en faveur d'une plus grande flexibilité des méthodes d'enseignement. Admettant la nécessité de se plier à une discipline théorique, il la juge néanmoins indissociable d'un apprentissage par l'expérience et l'expérimentation.

«Il y a une façon d'apprendre qui me plaît et une autre qui ne me plaît pas. Je suis sûr que c'est pareil pour beaucoup de gens. Garnir les rangs d'un amphithéâtre ou apprendre par soi-même sont deux choses différentes. Elles sont complémentaires, mais j'avoue que la discipline de groupe ne me plaît pas beaucoup.»

En ce sens, M. Son-Forget estime que la réforme du baccalauréat défendue par l'exécutif va dans la bonne direction. Il y voit une chance d'améliorer le système éducatif pour être plus adapté aux besoins des élèves en termes de méthode d'enseignement.

«Peut-être que la façon dont les programmes sont conçus mériterait d'être revue. […] Quand il y a l'intérêt et qu'on vous donne la confiance nécessaire pour faire certaines choses, vous les faites de plus bon cœur que si vous devez les quémander en prouvant dans un schéma pyramidal qu'on devrait vous laisser essayer.»

Le jeune député se montre également favorable à une remise en question des méthodes d'enseignement et à la structure très pyramidale de l'Éducation nationale. Il appelle en effet à se fier à «l'expérimentation» plus qu'aux «théories empiriques et parfois dépassées» pour définir ces méthodes et remplacer celles «qui ne sont pas adaptées à l'enseignement d'aujourd'hui» en n'ayant pas peur de s'inspirer d'exemples étrangers:

«Il y a clairement un retard qui est accusé par rapport à d'autres méthodes d'enseignement. Il faut aller regarder ce qui marche dans d'autres pays, ce qui pourrait marcher dans le nôtre à la lumière de nos connaissances.»

M. Son-Forget, docteur en sciences cognitives de formation, considère qu'une autre piste d'amélioration du système scolaire français est l'âge auquel sont acquises certaines compétences clefs. Il estime ainsi que l'apprentissage de la lecture et de l'écriture pourrait se faire plus tôt.

«Il y a une intuition que les bébés ont le sens du nombre avant même qu'ils soient capables de verbaliser. Il y a des tests qui permettent de le savoir depuis quelques années. On peut prétendre à apprendre plus tôt à lire et à écrire, même si ça fait peur à certains.»

La dernière piste d'amélioration, selon le jeune député, est à trouver dans l'évaluation des enfants. Il fustige «la note qui sanctionne», mais qui n'apporte pas de critique constructive et promeut une évaluation régulière ayant pour but d'identifier les signes qui annoncent un des difficultés ou un décrochage.

«Une des choses importantes, c'est d'évaluer régulièrement pour pouvoir détecter quelqu'un qui est en situation d'échec scolaire ou en passe de le devenir. On a parfois des signaux faibles ou forts très objectifs qui nous permettent de dire que quelqu'un s'éloigne d'une voie de progression.»

Santé: «Il y a des façons de faire qui permettent de sortir de certaines contraintes financières lourdes qui pèsent dans ces domaines.»

Le parcours de Joachim Son-Forget, entre médecine et l'ENS (École normale Supérieure), lui a permis d'avoir un bon aperçu du système de santé français. Il se déclare d'emblée en faveur d'une couverture universelle, «souhaitable» afin que chacun «puisse se soigner et avoir accès aux soins», mais explique qu'une bonne gestion financière est nécessaire pour pouvoir se permettre d'offrir une telle garantie aux Français.

«Il y a des choses qui sont de l'ordre de la gestion financière pour arriver à avoir un système qui permette une couverture universelle […] Il faut pouvoir faire vivre cette contrainte sociale avec une responsabilité financière»,

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Joachim Son-Forget, un député En Marche vers le dialogue international
sans toutefois préciser sa pensée. Il souligne que les dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale vont dans ce sens en visant «un système qui ne soit plus déficitaire dans un horizon proche» qui serait en même temps élargi au «remboursement des audioprothèses, de la dentisterie et des soins de lunetterie.»

Mais le député mentionne le courage politique nécessaire pour avoir une politique de santé efficace en France. Il insiste ainsi sur la nécessité de «tenir fort contre ceux qui remettent en question la science» et prend l'exemple de la vaccination.

«Il y a un recul sur la vaccination qui est de presque une centaine d'années. La technique est sûre, elle fonctionne et on ne peut pas laisser des visions conspirationnistes prendre le pas sur la vérité: ça protège, ça empêche les gens de mourir ou de souffrir de conséquences irréversibles à cause de maladies évitables.»

Il considère également que le système de santé français pâtit d'un manque de projection dans l'avenir. Le député se montre ainsi favorable à l'amélioration de la prévention, et ce malgré qu'elle n'apporte «aucun gain politique pour celui qui la met en œuvre». Il appuie une fois encore le besoin de courage politique pour prendre des mesures «qui pourront apparaître comme des restrictions», mais qui permettront d'améliorer l'espérance de vie et la santé des citoyens.

«Il faut être courageux politiquement en faisant de la prévention. Dans les règles de la démocratie, les gens sont élus pour des résultats rapides. Le problème c'est que la prévention, c'est le temps long.
Prévenir en amont, c'est proposer des politiques qui restreignent [les gens] dans leur liberté. Il faut faire prendre conscience des mauvaises conduites. C'est du courage politique parce que les gens ne vont pas avoir de résultat immédiat sur leur bien-être, mais pourraient le ressentir comme une contrainte, un contrôle.»

M. Son-Forget est convaincu que la télémédecine va prendre de l'ampleur et enjoint l'État à réagir et à légiférer sur le sujet. Il plaide pour que les services de santé se «rationalisent» afin d'optimiser les ressources et devenir plus compétitifs:

«Les métiers de la santé vont devoir se réorganiser, monter en gamme en connaissances technologiques et numériques. Il faut préparer ce tournant. Ça veut dire que certaines choses vont pouvoir se faire à distance, dans le contrôle et le suivi.»

Une révolution numérique qui porte sa part de risque en termes d'indépendance, rappelle le député des Français installés à l'étranger:

«Les grands groupes du numérique s'emparent tous de la santé avec beaucoup d'investissement. Il faut bien penser cette mutation, savoir si elle sera aux mains des grands groupes ou des grandes nations. […] On peut envisager des changements pour le meilleur comme pour le pire.»

Le numérique pose selon lui la question de l'échelle à laquelle les problématiques de santé doivent être abordées. Le député considère ainsi que l'avènement probable de la télémédecine permettra d'avoir des avis médicaux en temps réel depuis n'importe quel pays et fuseau horaire. La disparition des contraintes géographiques impose donc à l'État d'envisager la santé comme un enjeu global.

«Si on anticipe qu'à une échelle française ou européenne, peut-être que demain de grands pôles de télémédecine prendront le pas sur cette gestion de la santé […] Il faut avoir le courage d'avoir une vision très globale de la santé.»

Joachim Son-Forget, à travers son expérience personnelle, promeut une politique innovante et consciente des enjeux mondiaux à la fois en éducation, où il insiste sur la nécessité d'innover, de personnaliser la méthode d'enseignement et d'évaluer les résultats, que sur les problématiques de santé où il appelle de ses vœux à plus de courage et de projection pour répondre aux problèmes actuels.

 

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