Les femmes en passe de révolutionner l'industrie du jeu vidéo?

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Le monde vidéoludique peut-il réussir à faire de la place aux femmes? Alors qu'un joueur sur deux est une joueuse, seulement 15% de femmes travaillent dans cette industrie. Si les choses tendent à évoluer positivement, en témoigne la légion d'honneur donnée à la conceptrice de jeux vidéo Muriel Tramis, le chemin reste encore long.

Historique! Muriel Tramis devient la première femme conceptrice de jeux vidéo à être décorée de la légion d'honneur. Si ce couronnement est à saluer, la question de la place des femmes dans l'industrie du jeux vidéo reste prégnante. Or, il faut rappeler que désormais, un joueur sur deux est une joueuse. Comment expliquer que seulement 15% de femmes travaillent dans ce milieu? Pour Audrey Leprince, présidente de Women in Games France, cela s'explique, en partie, par «les stéréotypes de genre qui font que le jeu vidéo est encore perçu comme un loisir masculin même si les choses évoluent avec les nouvelles générations.» Miryam Houali, co-fondatrice d'Accidental Queens note une prise de conscience dans l'industrie mais également dans la société:

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«C'est une tendance générale, cela ne se limite pas aux jeux vidéo, c'est une tendance de fond. Cela fait partie des problèmes de société, on se rend bien compte qu'il y a plein de domaines, dont le jeu vidéo, dans lesquels les femmes étaient et sont toujours en minorité.»

Une prise de conscience dans le monde vidéoludique qui se traduit par une nouvelle représentation de la femme. «On voit qu'il y a de plus en plus de personnages féminins dans les jeux qui ne sont pas simplement là pour être sexualisées et être attractives pour les joueurs masculins. C'est intéressant car cela permet d'avoir une plus grande diversité de personnages et d'encourager aussi les femmes à s'intéresser aux jeux vidéos», déclare Miryam Houali. Le point d'orgue de cette «révolution»? Le salon mondial E3 qui se tenait à Los Angeles, en juin dernier.

«A une époque c'était inconcevable d'avoir des jeux avec des femmes héroïnes, des personnages principaux qui étaient des femmes. Cette année la moitié des jeux ont des femmes héroïnes et l'autre moitié propose systématiquement d'avoir le choix de jouer avec un homme ou une femme», s'enthousiasme Audrey Leprince.

Réelle envie des studios de véhiculer une meilleure image de la femme ou simple logique commerciale? «J'espère que c'est un peu des deux. Je suis certaine qu'il y a une prise de conscience des professionnels de l'industrie, de leur responsabilité sociétale par rapport à la représentation des femmes dans les jeux. Là-dessus, il y a des efforts qui sont faits. […] Il y a également une jeune génération de développeur homme qui sont probablement plus féministe que ne l'étaient leurs parents», déclare Audrey Leprince, également co-fondatrice de The game bakers.

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Malgré les efforts de l'industrie, «il y a un cercle vicieux qui se met en place». «Comme il y a peu de femmes, il y a peu de «role models» qui montrent des exemples de carrières réussies. Les jeunes filles en entendent donc moins parler, se projettent moins et s'imaginent moins à ces postes-là», regrette Audrey Leprince

Pour remédier à cette situation, Women in Game France a créé une liste de plus de 70 femmes (codeuses, artistes, testeuses, etc) qui sont prêtes à intervenir pour parler de leur métier lors de conférences, tables rondes, médias et dans les écoles de jeux vidéo.

«On s'attache à travailler avec les écoles de jeux vidéo mais aussi les écoles et lycées de France pour leur faire connaître les métiers du jeu vidéo, leur faire mieux connaître ces métiers et que l'on s'aperçoive que ce sont des métiers qui sont très ouverts aux femmes, que c'est une industrie en pleine croissance, qui recrute énormément et qu'il y a beaucoup de belles opportunités de carrières» explique Audrey Leprince.

Et pour cause, seuls 20 à 25% de femmes font une école dédiée aux métiers du numérique. Un manque de parité qui influe sur l'ambiance qui y règne.

«Tout de suite à la sortie du lycée, il y avait 1/3 de femmes pour 2/3 d'hommes mais effectivement l'ambiance pouvait être parfois sexiste notamment parce que les gens étaient un peu immatures. En master, il y avait encore moins de femmes, j'étais dans une promotion de 45 étudiants dont 7 étudiantes», se rappelle Miryam Houali.

Quel avenir pour les femmes dans l'industrie?

Avec la démocratisation des jeux vidéo et les nouvelles plateformes, les femmes ont une véritable carte à jouer. «Du côté des développeurs, ceux qui créent le jeu, c'est évident que l'apparition de plateformes comme Steam, App store (Apple), ou encore Play store (Androïd), la simplicité que l'on a eu soudainement à faire des jeux ont beaucoup contribué à faire apparaître des nouveaux créateurs et notamment des femmes.»

«Le fait de mettre des femmes à la création cela apporte évidemment des contenus et d'autres points de vue. On a de plus en plus de jeux différents qui émergent et de plus en plus de femmes qui jouent. C'est le cercle vertueux», détaille Audrey Leprince.

Le parcours de Miryam Houali d'Accidental Queens pourrait en témoigner: «On n'avait pas l'intention de monter un studio spécifiquement féminin. Accidental Queens est un studio qui s'est créé à la base pour développer le jeu "A Normal Lost Phone" dont le prototype a été créé lors d'une «game jam». [….] Le studio a été fondé par 3 femmes qui voulaient continuer professionnellement dans le jeu vidéo.»

Si la situation n'est pas parfaite pour les femmes, le tableau n'est pourtant pas si sombre comme le rappelle Audrey Leprince: «Actuellement, on a quelques studios à parité comme le studio Atelier 801 de Mélanie Christin qui avait à un moment 50% de femmes. Mais je tiens à dire que chez les gros éditeurs tels que Ubisoft par exemple, dès lors que l'on regarde du côté de l'édition, on arrive à 50% de femmes lorsque l'on ajoute les métiers marketing, communication, ressources humaines.»

Si de sérieux efforts restent à faire dans l'industrie, Miryam Houali explique que les femmes qui souhaitent se lancer doivent s'accrocher et surtout ne pas «se sentir illégitimes.»

«J'ai l'impression que c'est un des problèmes les plus récurrents chez les femmes. Il n'y a pas forcément cette culture, cette éducation qui permet de se mettre en avant. C'est quelque chose que les femmes doivent intégrer, ne pas avoir le syndrome de l'imposteur», conclut la co-fondatrice d'Accidental Queens.

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