Pourquoi l’EIIL veut-il exciser les femmes irakiennes ?

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Le directeur adjoint de l'Institut des études stratégiques de Damas le Dr Talib Ibrahim donne sa vision des faits dans un entretien accordé à La Voix de la Russie.

Les rebelles du groupe extrémiste L’Etat islamique, qui contrôlent actuellement toute la partie Nord de l’Irak et plusieurs régions en Syrie, ont émis une fatwa (un avis juridique) exigeant d’exciser toutes les femmes âgées de 11 ans à 46 ans, qui vivent dans la région. Près de 4 millions de femmes irakiennes pourraient être concernées.

Contrairement aux croyances populaires, cette procédure n’est ni obligatoire, ni souhaitable par l’Islam. Elle est pratiquée dans certains endroits dans le respect des coutumes locales et n’a rien à avoir avec la religion. Selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), l'excision risque d’avoir des complications, allant jusqu’à l’infertilité ou le risque accru de décès pendant l’accouchement.

Cette ablation d’une partie du tissu biologique chez la femme est pratiquée dans une trentaine de pays du monde, dont la Somalie, le Djibouti, la Guinée, l'Érythrée, le Soudan, l'Ethiopie et le Mali. Moins répandue, cette procédure est également pratiquée en Arabie saoudite, aux Emirats Arabes Unis, au Yémen, en Oman et au Bahreïn. En ce qui concerne l'Irak et la Syrie, l’excision n’était pas très courante dans ces pays jusqu’à présent. C’est pourquoi la représentante de l'ONU en Irak Jacqueline Badcock a exprimé sa profonde préoccupation au sujet de la nouvelle fatwa des rebelles. " Pour beaucoup de femmes, cette opération pourrait entraîner la mort ", a-t-elle indiqué.

Depuis plusieurs décennies, la communauté internationale emploie des efforts considérables pour lutter contre l'excision. En 2012, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté une résolution qui qualifie cette pratique de forme extrême de discrimination à l’égard des femmes.

Le correspondant de La Voix de la Russie a pris contact avec le directeur adjoint de l'Institut des études stratégiques de Damas le Dr Talib Ibrahim, qui a donné une évaluation de cette situation.

" Nous nous trouvons sur un tournant terrible de l’histoire du Moyen Orient ", explique-t-il. " Nous sommes témoins de la barbarie pratiquée par des factions barbares sauvages rebelles, dont le niveau de culture, d’intellect et de la spiritualité est excessivement bas. Ce sont des gens non satisfaits sexuellement. Se trouvant sur les territoires occupés, au lieu de reconstruire par exemple l’infrastructure, ils s’occupent de la régulation de la vie sexuelle des femmes. Ils accordent une attention particulière à l’excision, sous prétexte de mettre les femmes en garde contre la promiscuité. Et selon eux, le " djihad sexuel " en fait partie. Ces décisions ne sont qu’une couverture du manque catastrophique de discipline dans les rangs de ces groupes armés.

Quant à l'excision, cette procédure est pratiquée de manière tout à fait barbare. L’ablation ou la mutilation de la partie extérieure des organes génitaux sexuels féminins entraîne l'inflammation et des saignements, qui peuvent provoquer la mort. Ces " opérations " sont souvent menées avec des instruments non stérilisés, ce qui conduit à l'apparition d'une variété d'infections. Pour réduire les saignements, les rebelles utilisent le sel, ce qui provoque des douleurs terribles chez les femmes. Après l’intervention, la femme perd la sensibilité de ses organes sexuels et elle devient indifférente par rapport à son partenaire. N'est-ce pas une ruée de la barbarie et de l'obscurantisme?

Récemment, les militants de l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL) ont introduit certains nouveaux concepts dans leur doctrine, comme " un mariage pour une, deux, ou 24 heures ", ou encore le "djihad sexuel ". Ils dressent également des listes des femmes célibataires, pour lesquelles ils recherchent des partenaires. C’est de la prostitution légalisée, rien d’autre! D'un point de vue religieux, c'est de l’irréligion! D’après les canons musulmans, le mariage de la femme doit avoir lieu nécessairement après son consentement. Quant aux militants de l’EIIL, ils ne respectent aucune règle religieuse. Ce sont des athées – et que Dieu vous protège de ces hommes."

 

*Dr Talib Ibrahim, le directeur adjoint de l'Institut des études stratégiques de Damas

Propos recueillis par Natalia Chtcherbakova et Naowaf Ibrahim

La Voix de la Russie

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