Amis et ennemis du sud-est ukrainien et de la Russie

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L'agression occidentale en Ukraine a montré que les États-Unis n'avaient pas seulement oublié les principes du droit international. Ils ont déclenché une guerre où ils usent de tous les moyens pour conserver leur hégémonie.

L'agression occidentale en Ukraine a montré que les États-Unis n'avaient pas seulement oublié les principes du droit international. Ils ont déclenché une guerre où ils usent de tous les moyens pour conserver leur hégémonie. Et dans cette situation, la Russie sortira perdante si elle continue à laisser ceux qui luttent contre elle continuer de gagner leurs capitaux sur ses richesses naturelles.

En Occident

La présidente du Front nationale Marine Le Pen et le leader de la coalition grecque Syriza Alexis Tsipras ont condamné les opérations punitives de Kiev en Ukraine du sud-est et ont même déclaré que s'ils remportaient les élections dans leurs pays respectifs ils choisiraient de quitter l'Otan.

Après ces déclarations, la dirigeante du FN a été victime d'une campagne médiatique visant à discréditer son parti. La raison du lancement de cette propagande fut la phrase prononcée par son père, Jean-Marie Le Pen, au sujet du chanteur Patrick Bruel (fervent critique du FN): "On fera une fournée la prochaine fois". Marine Le Pen a immédiatement déclaré que le sens donné à ces propos révélait d'une interprétation malveillante et qu'ils n'avaient aucune connotation antisémite.

Néanmoins, cette réponse n'a pas satisfait le président du Congrès juif européen Viatcheslav Kantor. Il a exigé non seulement de condamner Jean-Marie Le Pen au pénal mais aussi de le priver de son mandat de député européen. Kantor a également appelé les dirigeants de l'UE à s'unir contre les eurosceptiques.

"Le Pen a dévoilé le vrai visage de l'extrême-droite… Cette frange du paysage politique s'appuie toujours sur la haine, l'antisémitisme et la xénophobie. Les succès alarmants des partis extrémistes aux élections européennes résultent de la passivité des dirigeants et gouvernements européens… Pour préserver les valeurs de l'Europe unie contemporaine les dirigeants européens doivent renforcer la responsabilité juridique pour la propagande de la haine… Et valoriser le travail des enseignants afin d'inculquer à la future génération l'aversion pour la haine, l'intolérance et la xénophobie", a déclaré Kantor.

La lutte active du président du CJE contre les eurosceptiques fait contraste avec sa passivité concernant la protection des juifs contre les combattants du Secteur droit à Odessa et dans le Donbass. En consultant le site du CJE, on a l'impression que le sort de la communauté de Bruxelles (environ 15 000 personnes, selon l'Encyclopédie numérique juive de 2004) le préoccupe davantage que celui de toute la diaspora en Ukraine (103 600 personnes, selon le recensement de 2001 qui est loin d'être complet).

Les combattants d'Igor Kolomoïski, financier du Secteur droit, ont peint des croix gammées sur les murs de l'ambassade de Russie à Kiev. Mais Kantor passe sous silence l'"expression artistique" du gouverneur de Dniepropetrovsk. D'ailleurs, les dirigeants de Tel-Aviv ne réagissent pas non plus aux actions ouvertement néonazies de Kolomoïski (citoyen d'Israël, soit dit en passant).

Le 2 mai 2014, les combattants du Secteur droit ont incendié à Odessa la Maison des syndicats alors même que des citoyens ukrainiens étaient enfermés à l'intérieur. Selon le recensement de 2001, 12 400 juifs habitent dans cette ville (en réalité ils sont bien plus nombreux, sachant que dans les années 1970 ils étaient près de 120 000). Malgré tout le CJE publie sur son site des communiqués indiquant que les juifs n'ont rien à craindre.

Selon les mêmes sources, 11 476 juifs vivent dans les régions de Donetsk et de Lougansk. Aujourd'hui, les autorités de Kiev bombardent ces régions avec l'aviation et l'artillerie. D'après le site du CJE, ce n'est pas l'antisémitisme mais le chaos dans le Donbass qui représente un risque pour les juifs (faisant allusion à l'incapacité des autorités de Donetsk et de Lougansk de rétablir l'ordre dans la région).

Dans le même temps, c'est Marine Le Pen du FN qui lutte contre la renaissance du fascisme en Ukraine. Le parti considéré par le président du CJE comme "extrémiste" cherche en fait à protéger les habitants du sud-est - y compris juifs - contre l'agression de Kiev.

Enfin, il convient de rappeler que les néonazis ukrainiens ne menacent pas particulièrement la France. Ils visent avant tout la Russie, pays où Viatcheslav Kantor gagne sa vie. Il est propriétaire du holding Akron et occupe la 49ème place dans le classement Forbes 2014 des hommes d'affaires les plus riches de Russie (2 milliards de dollars). Alors pourquoi fait-il preuve d'une telle indifférence envers les vies de la diaspora juive du sud-est de l'Ukraine et à l'égard du sort du pays où il est né, a grandi et gagné sa fortune? Et pourquoi, dans ce contexte, participe-t-il de manière aussi ostentatoire à discréditer la force politique qui soutient la position de la Russie en cette période si difficile?

A l'est

Le premier ministre russe Dmitri Medvedev a dévoilé le montant de l'aide financière accordée par Moscou à l'Ukraine depuis son indépendance – 250 milliards de dollars. Il s'agit en majeure partie de diverses préférences et remises gazières. A en juger par les confessions des dirigeants de Kiev, cet argent n'allait pas dans la poche des Ukrainiens.

En 1998, l'un des plus importants hommes d'affaires du pays, Igor Bakaï, a reconnu dans une interview accordée au quotidien russe Nezavissimaïa gazeta: "Toutes les personnes aisées en Ukraine ont fait leur fortune sur le gaz". Et la situation n'a pas changé dix ans plus tard.

En 2011, le président de la commission du parlement ukrainien pour la sécurité nationale et la défense Anatoli Gritsenko a reconnu que pratiquement tous les oligarques avaient gagné et continuaient s'enrichir sur le commerce des hydrocarbures russes. Si en 2004 aucun Ukrainien n'entrait au classement des milliardaires de Forbes, ils étaient déjà cinq en 2011.

Les médias appartenant aux oligarques mènent constamment une propagande antirusse et aujourd'hui l'oligarchie ukrainienne aide Kiev à réprimer les russophones dans le Donbass.

Le gouvernement ukrainien refuse aujourd'hui de rembourser à Moscou sa dette gazière de presque 4 milliards de dollars. Et la question n'est pas de savoir pourquoi pendant plus de vingt ans Gazprom a fermé les yeux sur les nombreuses magouilles autour des hydrocarbures russes. Elle est de savoir pourquoi les Américains, ayant dépensé pendant la même période 5 milliards de dollars pour la propagande (officiellement la "création d'institutions démocratiques") ont formé auprès d'une grande partie de la société ukrainienne un état d'esprit antirusse et 250 milliards de dollars de la Russie ont profité à ses ennemis: les oligarques ukrainiens.

Et surtout, pourquoi l'argent de l'Etat russe travaille contre les Russes dans le sud-est ukrainien – l'Echo de Moscou, dont 66% des actions appartiennent à Gazprom Media Holding mène une campagne de propagande active contre les "séparatistes" des républiques populaires de Donetsk et de Lougansk?

Nous ne pourrons pas trouver une issue à la crise ukrainienne sans avoir répondu à ces questions.

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

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