Des Pussy Riot aux Femen, croisade contre les églises?

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Alexandre Latsa - Sputnik Afrique
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L’affaire Pussy Riot n’en finit pas de faire des vagues. Jamais le Main Stream Médiatique ne se sera autant déchainé contre la Russie "de Vladimir Poutine".

L’affaire Pussy Riot n’en finit pas de faire des vagues. Jamais le Main Stream Médiatique ne se sera autant déchainé contre la Russie "de Vladimir Poutine". Les qualificatifs émotionnels n’ont pas manqué, la presse française n’a pas hésité à parler de Camp lorsqu’il n’était pas affirmé que la Russie réinventait le Goulag (au choix). L’objectif est clair, tenter d’accoler une rhétorique totalitaire pour faire monter la pression médiatique et choquer l’opinion internationale. Alors que de nombreux lecteurs m’ont écrit pour me demander ce qu’il en était des autres Pussy Riot masquées qui ont participé à l’action, qu’ils soient rassurés, celles-ci ne sont pas des agents du FSB qui ont participé à une provocation comme cela m’a été soufflé par un lecteur, elles sont bel et bien recherchées, au dernière nouvelles elles auraient même fui le pays.  Le Main Stream ne cesse en outre de marteler que les jeunes femmes auraient été condamnées pour une prière anti-Poutine et ce malgré le fait que le juge et le jugement ne mentionnent pas ce fait.

Encore une fois on ne peut que constater que le Mainstream dirige de façon méthodique et obsessionnelle cette affaire vers la personnalité de Vladimir Poutine, un peu comme cela était le cas lors des incendies de 2010, ou l’offensive médiatique contre un pays en Flammes avait atteint un niveau d’agressivité sans précédent. De la même façon que le premier ministre était tenu pour responsable de chaque départ d’incendie en 2010, il est désormais tenu responsable de chaque condamnation dans le pays, surtout celles qui déplaisent  à certains artistes Américains et Européens. Ces derniers n’ont-ils aucune autre priorité en tête ? A leurs yeux une condamnation à 14 mois de prison pour blasphème (2 ans moins la période de préventive déjà effectuée) justifie vraiment qu’ils prennent position contre ? Curieusement pourtant, on ne les entend pas lorsqu’au sein de l’Union Européenne, en Pologne, une célèbre chanteuse de pop est actuellement poursuivie et risque aussi deux ans de prison ferme pour « simple » blasphème. Personne n’a l’air d’être choqué par le fait qu’en Allemagne des soutiens aux Pussy Riot ont envahi la cathédrale de Cologne. En Allemagne la loi prévoit que ces manifestants risquent jusqu’à 3 ans de prison, pour avoir perturbé un office religieux.

Mais l’opération de marketing est bien organisée, par le bras droit de Boris Berezovski notamment, qui a contribué à financer la défense des trois jeunes femmes, l’oligarque maudit ayant lui aussi mis son grain de sel dans le dossier, en écrivant au président Poutine. Que doit-on sincèrement penser de ces soutiens politiques inattendus?

Curieusement cela n’a visiblement choqué personne que de nombreuses églises soient vandalisées et des croix coupées en Russie depuis la condamnation des trois jeunes filles (voir ici, la ou ici). Ces actions ont été exécutées sur le modèle de l’action qui a eu lieu en Ukraine le 17 aout dernier lorsqu’une militante Femen a scié devant une caméra et en soutien des Pussy Riot une croix catholique érigé en mémoire des martyrs du communisme. Depuis, le mouvement féministe Femen, spécialisé dans les actions coup de poing "seins à l’air" par de ravissantes poupées a annoncé être prêt à scier toutes les croix de Russie pour sauver le pays. Récemment ces dernières ont également tenté d’agresser le patriarche Kirill lors de sa visite en Ukraine, revendiquant l’action sous le terme hautement démocratique "Tuons Kirill", la photo liée étant assez parlante. Après avoir été traité de chien par les Pussy Riot, celui-ci est désormais présenté mort et décapité sur des affiches, tout comme le Pape ou encore les présidents russes et Biélorusses, peut on trouver ca normal ?

Les Femen ont aussi organisé cet été une action pour dénoncer la participation aux J.O. de Londres de régimes islamistes et sanglants, ou encore une action au Vatican contre le Pape. A Paris, elles ont aussi lancé l’action "No Shariah" ! Plus récemment c’est de façon surprenante au Brésil qu’un nouveau groupe Femen est apparu. Une poignée de militantes à manifesté devant le consulat Russe de São Paulo en soutien aux Pussy-Riot, tout en hurlant des slogans insultants à l'encontre du Président Russe Vladimir Poutine, parfois en Anglais, ce qui n’est pas sans rappeler les manifestations de l’opposition russe à Moscou dans les années 2000.

Cette croisade anti chrétienne se poursuit donc en Europe de l’ouest et avec certains soutiens français puisqu’une des représentantes des FEMEN (Alexandra Shevchenko) était notamment présente à la réception du 14 juillet dernier à l’ambassade de France à Kiev, et que récemment les Femen ont annoncé créer leur base arrière en France, avec vraisemblablement le soutien du mouvement "Ni Putes ni soumises" et de Safia Lebdi, conseillère régionale d’Ile-de-France et cofondatrice de l’association "ni putes, ni soumises". Dernier soutien en date, lors du congrès du parti écologiste, les élus et militants verts français ont eux aussi affirmé leur soutien aux Pussy Riot en se faisant photographier en cagoule.

En Russie, les conséquences de ces agressions contre l’église orthodoxe et contre le patriarche Kiril ne se sont pas  fait attendre, des mouvements orthodoxes ont affirmé souhaiter la mise en place de milices pour défendre les églises et nul ne doute que si des attaques similaires devaient avoir lieu contre des mosquées, la communauté musulmane russe réagirait de la même façon. D’un point de vue intérieur, ces stupides actions ont du reste sans doute parfaitement resserré les liens entre les croyants de toutes les confessions et vont sans doute jeter un très lourd discrédit sur l’opposition russe, désormais assimilée à tort ou à raison aux Pussy Riot. Dans une récente interview donnée à la presse allemande, l’oligarque Michael Khodorkovski, qui est en prison, n’a d’ailleurs pas manqué de critiquer la condamnation des Pussy Riot, mais en critiquant aussi sévèrement au passage le comportement inadéquat de l’opposition russe, une analyse qu’aucun média n’a visiblement jugé bon de traduire correctement.

Maintenant, on peut naturellement se demander quels sont les projets de cette galaxie qui prétend défendre le féminisme, mais qui de l’exubérance vulgaire à la nudité, à la masturbation en public en passant par la grossièreté et le non respect des églises, donne finalement une bien piètre image du féminisme et des femmes, contrairement à la tradition slave.

L’opinion exprimée dans cet article ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction, l'auteur étant extérieur à RIA Novosti.

* Alexandre Latsa est un journaliste français qui vit en Russie et anime le site DISSONANCE, destiné à donner un "autre regard sur la Russie". Il collabore également avec l'Institut de Relations Internationales et Stratégique (IRIS), l'institut Eurasia-Riviesta, et participe à diverses autres publications.

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