UE-Russie: pas de sanctions, mais un signal de coopération

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Par Oleg Mitiaïev, RIA Novosti
Par Oleg Mitiaïev, RIA Novosti

Le sommet extraordinaire de l'Union européenne consacré à l'avenir des rapports entre l'UE et la Russie à la suite de la guerre en Ossétie du Sud s'est tenu le 1er septembre à Bruxelles. L'Union, principal partenaire commercial de la Russie, s'est abstenue de toute sanction économique contre son grand voisin de l'Est. Le fait est que l'Europe dépend fortement des livraisons de ressources énergétiques russes. De plus, les grandes compagnies occidentales sont très attachées à l'extension de leur activité en Russie.

Néanmoins, la possibilité de prendre des sanctions économiques à l'encontre de la Russie a été sérieusement examinée à la veille du sommet extraordinaire de l'UE. Ainsi, la Pologne a proposé de prendre des mesures économiques et financières assez dures à l'égard de la Russie. Conformément au projet de résolution polonais, l'Union européenne aurait pu recommander aux grandes entreprises de réduire leurs investissements en Russie, en qualifiant le marché russe d'instable et en y associant de nombreux risques. Une autre proposition consistait à introduire des restrictions sur une liste de produits exportés en provenance de Russie: métaux, engrais, etc. Enfin, l'Union européenne pouvait conseiller aux banques européennes de ne plus refinancer les banques et entreprises russes.

Cependant, les grands pays de l'UE, qui sont aussi les principaux consommateurs de ressources énergétiques russes - l'Italie, l'Allemagne et la France - se sont prononcés contre toute sanction économique, quelle qu'elle soit. Rien d'étonnant, puisque l'UE est le principal partenaire commercial de la Russie. La part de l'Union européenne dans le chiffre d'affaires des échanges commerciaux de la Russie dépasse 50%. Les livraisons de ressources énergétiques russes à l'UE en constituent la majeure partie. La Russie livre actuellement à l'UE un tiers du pétrole et 40% du gaz consommés par les Vingt-sept.

Bref, la résolution du sommet ne parle d'aucune sanction économique contre la Russie à cause de son conflit militaire avec la Géorgie. Ce document abonde en expressions évasives, ce qui peut être considéré comme une relative victoire diplomatique de Moscou. On y lit notamment que les rapports entre l'UE et la Russie doivent être soumis à une révision minutieuse, qu'ils ont atteint un point critique qui implique une conversation sérieuse. D'autre part, les leaders de l'UE ont chargé leurs bureaucrates de rechercher des sources d'énergie alternatives en vue de réduire la dépendance énergétique de l'Union vis-à-vis des livraisons russes. Cependant, ce n'est pas la première fois que cet objectif est posé, et aucune réponse n'a encore été trouvée.

Les partisans d'une ligne dure à l'égard de la Russie - la Grande-Bretagne et la Pologne - doivent se contenter d'un point de la résolution évoquant la suspension des négociations avec Moscou sur un nouvel accord de partenariat et de coopération. Celles-ci avaient d'ailleurs traîné en longueur pendant un an et demi à cause des positions de la Pologne et de la Lituanie, et n'avaient repris que cet été. Quoi qu'il en soit, cet accord ne joue qu'un rôle symbolique et il n'a pas une importance de principe pour la Russie.

Qui plus est, l'Italie, la France et l'Allemagne déclarent unanimement qu'il est inadmissible d'isoler la Russie et qu'il faut poursuivre le dialogue avec elle. Selon la chancelière allemande Angela Merkel, la dernière résolution de l'UE sur la Russie est même un signal d'alliance envoyé de Bruxelles.

Les contacts économiques entre l'Europe et la Russie ne peuvent pas être rompus, tout d'abord parce que, pour les entreprises ouest-européennes et mondiales, la présence sur le marché russe en plein développement est incontournable.

Ainsi, les plus grands constructeurs automobiles mondiaux, représentés en Russie par leurs filiales européennes, n'ont aucune intention d'arrêter leur production dans le pays, au contraire, ils l'élargit. On peut les comprendre, car, cette année, d'après toutes les prévisions, la Russie deviendra le plus grand marché automobile en Europe, en devançant l'Allemagne. Même le géant pétrolier britannique BP, dont la "filiale" TNK-BP se heurte actuellement à des difficultés bien connues, a l'intention de développer son activité en Russie.

L'optimisme des investisseurs et exportateurs européens à l'égard de la Russie est partagé par leurs collègues américains. La semaine dernière, le Conseil national pour le commerce international des Etats-Unis, qui regroupe plus de 300 entreprises, a invité le président George W. Bush à ne pas prendre de sanctions économiques contre la Russie. La semaine dernière également, PepsiCo a finalisé le rachat de Lebedianski, le plus grand producteur russe de jus. L'entente était intervenue dès le printemps, ce qui laissait le temps de réfléchir. Comme on le voit, PepsiCo n'a rien changé à ses plans.

Certes, le conflit en Ossétie du Sud a causé un certain préjudice aux investissements étrangers en Russie, en premier lieu aux investissements financiers, particulièrement enclins aux humeurs spéculatives. Au cours du conflit, la fuite des capitaux, en premier lieu sur le marché des valeurs, a constitué d'après différentes estimations 8 à 20 milliards de dollars. La semaine suivante, 3 à 4 milliards de dollars sont venus s'y ajouter.

Mais, comme l'affirment les experts du marché des valeurs, rien n'a fondamentalement changé dans l'économie russe, les grandes entreprises russes restent très rentables, par conséquent, c'est le moment de racheter leurs titres "à vil prix". C'est pourquoi les investisseurs étrangers reviendront probablement avant la fin de l'année sur le marché russe des actions.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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